Nous nous sentons privilégiés, ou à l’inverse défavorisés, discriminés ou méprisés « en tant que » : en tant que salarié, en tant que précaire, en tant que jeune, vieux, femme, immigré, homosexuel, habitant de tel quartier, etc. La liste est potentiellement longue, et renvoie au vécu subjectif des personnes. Ces discriminations mettent en cause non plus le groupe collectif, mais les individus eux-mêmes. Ces derniers se sentent agressés, abandonnés et méprisés, ce qui alimentent des passions tristes : colère, ressentiment, haine….
Un « régime des inégalités de classe » a ainsi fait place à un « régime des inégalités multiples » qui met la politique au défi. Comment parvenir à représenter ces inégalités singulières ? Comment reconstruire des formes de solidarité ? Voulons-nous vraiment l’égalité ?
Le sociologue François Dubet, professeur émérite à l’université Bordeaux-II et directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS), a publié récemment Tous inégaux, tous singuliers. Repenser la solidarité (Seuil) et Le Temps des passions tristes. Inégalités et populisme (Seuil).